« On n’aime peut-être jamais que par erreur. »
Anne Serre

Les comptes-rendus-avis de lecture de la librairie Vaux Livres

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Romans traduits par Carine Chichereau

Darragh MCKEON

Le Dimanche du souvenir
Belfond

4 | 237 pages | 11-08-2023 | 22€

en stock

Simon s’écroule littéralement dans une rue de New-York victime d’une crise d’épilepsie. La crise est violente et il n’en avait plus fait depuis trente ans. On le retrouve sur une table d’opération, espérant une réparation physique du mal qui le touche depuis son enfance. Cela suffira-t-il ? Simon revient aux sources, à son enfance dans la campagne irlandaise, dans la ville d’Enniskillen. Une remontée dans le passé, aux côtés de son père, sa mère étant morte rapidement. Il rencontrera Esther, une jeune hollandaise venue s’installer temporairement dans une ferme voisine. Ils passeront une nuit, isolés, sur une île. Isolés mais pas seuls, puisque Simon croisera des hommes déchargeant discrètement du matériel en pleine nuit et échappera au pire grâce à l’un d’eux qui les protègera et les enjoindra à se cacher en silence. Une rencontre, une voix qui, aujourd’hui il le sait, le marquera à jamais ainsi que l’attentat meurtrier quelques jours plus tard, dans sa ville, le 8 novembre 1987 à 10h43 pendant le Dimanche du souvenir, 10h43 l’heure de ses premières crises d’épilepsie... Il reviendra sur son engagement, sur le moment où il a fallu choisir son camp, sans retour en arrière possible, définitivement. Puis, entouré de son frère et de ses convictions, son entrée dans le combat, lui qui aspirait à une vie simple avec sa femme et ses enfants. L’engagement va l’aspirer dans une spirale infernale, incontrôlée jusqu’à l’irréparable. Aujourd’hui, il est temps de regarder la vérité et ce passé en face, d’analyser cette tragique trajectoire pour espérer assimiler un passé qui le minait depuis de longues années. Un récit puissant, émouvant au cœur de l’engagement, de la vraie radicalité, de la violence et des cicatrices qu’elles laissent et qui prennent des années à cicatriser, si elles cicatrisent.

« Aie pitié des riches, lui disait sa mère, ils ne peuvent pas vivre dans l’illusion que l’argent fait le bonheur. »

« ... on n’est jamais propriétaire de la terre, on l’entretient pour la génération suivante. »

« La paix ne peut advenir qu’après les jours les plus sombres. »

Ecouter la lecture de la première page de "Le Dimanche du souvenir"

Fiche #3067
Thème(s) : Littérature étrangère
Traduction : Carine Chichereau


Caleb Azumah NELSON

Open water
Denoël

3 | 202 pages | 04-08-2022 | 19€

Il est photographe. Elle est danseuse. Ils se croisent pendant une soirée, elle est l’amie de son ami, mais un regard suffit, ils savent tous les deux, que quelque chose s’est passé, s’est noué, qu’ils se reverront dans le cadre d’une relation « honnête ». Ils se revoient rapidement, et puis encore, et puis encore. Ils se découvrent une vraie amitié, osent se regarder, se toucher, se confier, partager leur confrontation avec le racisme, le regard des autres, les présupposés violents dus à leur couleur de peau... Ils parcourent le sud-est de Londres ensemble dans les chaleurs de l’été, les évènements leur rappellent régulièrement leur couleur de peau, la peur est en lui et le mine. Mais les sentiments commencent de naitre, « Vous jouez l’un et l’autre à ce jeu aux enjeux trop élevés... », l’amour avance, le désir croît seconde après seconde sans qu’ils n'osent se l’avouer ou l’avouer à l’autre, « Donner un voix au désir, c’est lui donner un corps qui peut respirer et vivre. ». Comment aimer et vivre quand l’insécurité, la peur et le danger sont permanents ? Un superbe roman d’amour qui dissèque les sentiments qui traversent une relation amicale ou amoureuse, un portrait émouvant d’un jeune homme noir amoureux, mais dramatiquement paralysé par le racisme qui perdure même dans une ville annoncée depuis des décennies comme absolument cosmopolite.

Premier roman

« Tu découvriras bientôt que l’amour te cause de l’inquiétude, mais qu’il te rend beau. »

« Comment se débarrasse-t-on du désir ? L’exprimer, c’est semer une graine, savoir que d’une manière ou d’une autre elle va pousser. C’est l’admettre et se soumettre à quelque chose qui se situe à l’extrême limite de ta faculté de compréhension. »

« Il n’y a en vérité que deux scénarios possibles quand on écrit : un inconnu arrive en ville, ou bien une personne part en voyage. Les bons livres ne sont que des variations sur ces thèmes. »

« Ne rien faire avec quelqu’un, c’est lui faire confiance, et faire confiance, c’est aimer. »

« Deux solistes qui mènent des conversations si harmonieuses qu’ils ont du mal à se séparer. Vous n’êtes pas les musiciens mais la musique. »

« Tu sais qu’aimer, c’est à la fois nager et se noyer. Tu sais qu’aimer, c’est être entier, partial, une attache, une fracture, un cœur, un os. C’est saigner et guérir. C’est faire partie de ce monde, honnête. C’est installer quelqu’un près de ton cœur battant dans l’obscurité absolue de tes entrailles et avoir confiance dans le fait que l’autre te serrera très fort. Aimer, c’est faire confiance, et faire confiance, c’est avoir foi en l’autre. Comment pourrait-on aimer autrement ? »

Ecouter la lecture de la première page de "Open water"

Fiche #2889
Thème(s) : Littérature étrangère
Traduction : Carine Chichereau


Julie OTSUKA

Certaines n'avaient jamais vu la mer
Phébus

2 | 144 pages | 12-08-2012 | 15€

Au début du XXème, un groupe de jeunes Japonaises de 12 à 37 ans venant de toutes les régions du pays part en bateau à destination des Etats-Unis pour se marier. Elles ont en main une photo du futur époux qu’elles n’ont pas choisi, des portraits ressemblant à ceux de leurs pères et frères. Confiantes, pleines de rêves, elles débarquent à San Francisco et la déception sera à la hauteur de leurs espoirs. Les voix sont multiples, et rendent compte des différents instants de vie de ces femmes. Rien ne correspondra à ce qui était annoncé, l’accueil, la vie de couple, les enfants, le travail… Le déclenchement de la seconde guerre et Pearl Harbour éprouvera considérablement le quotidien de la communauté japonaise… Un récit choral puissant qui revient avec précision et humanité sur un exil tourmenté, décevant et amer.

Ecouter la lecture de la première page de "Certaines n'avaient jamais vu la mer"

Fiche #1168
Thème(s) : Littérature étrangère
Traduction : Carine Chichereau


Joseph O'CONNOR

Muse
Phébus

1 | 280 pages | 16-07-2011 | 19.25€

John Millington Synge fut un grand dramaturge irlandais du début du XXème. Agé de 37 ans, éperdument amoureux, il fréquente la jeune et prometteuse comédienne Molly Allgood. Sa passion pour cette muse est difficilement acceptée, différence d’âge, différence de classe... Elle s'achèvera avec la mort prématurée de Synge. Cinquante ans plus tard, Molly revient dans un dialogue avec elle-même sur cette aventure dans l’Irlande des années 1900. Actrice déchue et délaissée, elle est pauvre, seule et boit mais n’a rien oublié de ces années. Les souvenirs resurgissent, l’interpellent, son refus des conventions, leur passion partagée, leurs différences... Triste fin de vie de cette actrice qui a endossé merveilleusement les rôles créés par l’auteur qu’elle adulait et l’homme qu’elle aimait. Elle fut reconnue, admirée puis oubliée. « Professionnelle de la mémoire », elle se souvient de tout, de leurs échanges, des lettres, de leurs querelles, de leurs différences marquées (même leurs parlers s’opposaient) qui pourtant les rapprochaient. Muse nous offre deux portraits exceptionnels de deux personnages hors du commun avec comme toile de fond une Irlande puritaine au quotidien âpre et d’une passion partagée par deux caractères différents.

Fiche #984
Thème(s) : Littérature étrangère
Traduction : Carine Chichereau